Société
Retour10 mars 2021
Jean-Philippe Thibault - jpthibault@medialo.ca
Rencontre citoyenne virtuelle sur le transport par autocar en Gaspésie
GASPÉSIE
©Jean-Philippe Langlais - Chaleurs Nouvelles
La rencontre aura lieu virtuellement le jeudi 11 mars de 19 h 30 à 21 h 30.
La menace de Keolis d’interrompre les services d’Orléans Express entre Rimouski et Gaspé a remis de l’avant pour une énième fois la fragilité du transport collectif dans la région.
La décision initiale a suscité grogne et inquiétude. Deux jours avant l’échéance d’interruption de service, le transporteur par autocar a finalement annoncé qu’il continuerait de prendre la route, notamment grâce aux 10 millions de dollars injectés dans le Programme d’aide d’urgence au transport interurbain par autobus. Ce dernier se termine cependant à la fin du mois, le 31 mars. Quid pour la suite?
Pour Alexis Deschênes, avocat et ex-journaliste, un arrière-goût demeure. « Allons-nous tolérer encore qu’un transporteur travaille à réduire nos services? », s’interroge-t-il. De ce sentiment d’urgence est née l’idée de lancer une rencontre citoyenne pour que tous puissent partager leurs solutions. « Les commentaires ont été nombreux à la suite d’une chronique que j’ai publiée sur le sujet. C’est en discutant avec mon ami Simon Aubert que nous est venue l’idée d’organiser un événement où tous et toutes pourraient se rassembler et échanger de l’information pour nourrir notre réflexion. »
La rencontre aura lieu virtuellement le jeudi 11 mars de 19 h 30 à 21 h 30. La formule adoptée consiste en un tour de table où chaque personne disposera de 3 minutes pour partager sa compréhension des problèmes avec la situation actuelle et les solutions possibles.
Les personnes et les organisations intéressées à y participer peuvent se joindre à l’événement Facebook et remplir ce formulaire pour réserver un tour de parole. Le lien Zoom sera envoyé aux personnes qui se seront inscrites, mais l’événement pourra également être suivi directement via une vidéo en direct sur la page de l’événement Facebook. Alexis Deschênes et Simon Aubert se disent convaincus que les faits et les idées qui seront partagés pourront nourrir la réflexion de chacun pour assurer un service de transport par autocar de qualité en Gaspésie.
Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités [Article du Gaspésie Nouvelles - 17 février 2021]
Un transporteur par autocar privé régi par la Commission des transports du Québec – Keolis Canada en l’occurrence pour ne pas le nommer – peut-il de son propre chef décider de suspendre une desserte, vers la Gaspésie par exemple?
Plusieurs se sont posé la question lorsque l’entreprise a fait part de ses intentions de cesser ses arrêts à l’Est de Rimouski à partir du 8 février. Du nombre, Alexis Deschênes, avocat gaspésien bien connu œuvrant pour l’aide juridique à New Richmond. Ce dernier, également blogueur pour le Graffici, s’est penché plus amplement sur le dossier en épluchant la règlementation entourant le permis de Keolis Canada, délivré par la Commission des transports du Québec. Et en gros, la réponse, c’est non. « C’est quelque chose de balisé et on ne peut pas décider unilatéralement du jour au lendemain qu’on va cesser ses activités. C’est établi et c’est important que tout le monde le sache. Les Gaspésiens ne sont pas des otages, c’est possible de se défendre », résume-t-il.
À la CTQ de décider
Tout d’abord, pour modifier, réduire ou supprimer un itinéraire, un transporteur doit avoir l’aval de la Commission des transports du Québec (CTQ). Avant de prendre sa décision, ce tribunal administratif doit tenir des audiences où les différentes parties impliquées peuvent se faire entendre. Fin janvier, Keolis Canada a bel et bien placé une demande de suspension de services en Gaspésie auprès de la CTQ, mais cette dernière n’avait alors rendu aucune décision. Aucune audience n’avait eu lieu. « À ce moment, même si le transporteur indiquait qu’il allait interrompre tous ses services, il n’avait pas la permission de la CTQ. C’était peut-être une intention, mais l’autorisation n’était pas là. C’était soit une fausse menace, soit qu’ils s’apprêtaient à aller de l’avant avec une interruption illégale », explique l’avocat.
C’est de cette façon que sans surprise, il a appris comme tout le monde – à deux jours de l’ultimatum – le retour du transporteur sur la Gaspésie à partir du 8 février. D’autant plus que le transporteur s’exposait à des sanctions qui auraient pu aller jusqu’à la révocation du permis si jamais il avait maintenu sa décision sans l’accord du tribunal administratif.
« Le permis donné, ça vient avec un impératif de donner les services inclus dans le permis. L’État va contrôler le marché, mais en contrepartie ça vient avec des obligations. L’article 40 de la Loi sur les transports dit que la CTQ peut de son propre chef, ou sur la demande du ministre des Transports, ou sur demande de tout intéressé – un usager mécontent qu’Orléans Express cesse ses services par exemple – peut faire une demande pour la suspension ou la révocation du permis. Une des causes qui peuvent être alléguées c’est si un transporteur a supprimé ses services sans autorisation et s’il ne fournit pas un service de qualité. L’article 40.3 stipule aussi que la CTQ doit révoquer le permis de transport par autobus d’un transporteur qui ne fournit pas pendant au moins 30 jours les services autorisés par son permis, à moins qu’il ne démontre que la cause de son défaut ne peut lui être imputée. »
Après le 31 mars?
L’aide d’urgence de 10 millions de dollars injectée par Québec pour le maintien du service par autocar – dont Keolis Canada s’est prévalue – n’est pour l’instant disponible que jusqu’au 31 mars. Plusieurs se questionnent déjà sur le sort qui sera réservé au transport par autocar après cette date. Si la CTQ tient audience d’ici là, elle aura le loisir de décider de la suite des choses. Mais plusieurs songent déjà à un plan B.
D’autres rappellent aussi qu’il s’agit avant tout d’un service, souvent essentiel, pour notamment se faire prodiguer des soins de santé à l’extérieur. Sur ce point, certains observent que les arénas municipaux, parmi d’autres exemples, sont souvent déficitaires sans que personne ne songe à les fermer puisque ce service de loisir est accepté comme tel par la majorité des citoyens. Un élément à considérer pour revoir le modèle actuellement en vigueur?
« L’impératif de rentabilité, on devrait l’écarter, estime Alexis Deschênes. Si on habite Chandler et qu’on a besoin de soins à Rimouski, ce n’est plus une question de savoir si c’est payant ou pas de l’amener jusque là-bas. La personne en a besoin et on doit l’apporter. On devrait, je crois, trouver une formule dont le seul objectif est de fournir un service de qualité aux Gaspésiens. Je sens que la situation a suscité une réflexion et qu’on mérite mieux que ça, de devoir se battre à chaque année pour ne pas se faire enlever des services. L’idée c’est de passer de la colère aux actes. »
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